Du temps de l’Antiquité grecque, les accusés devaient plaider seul face aux juges… Pourquoi ne peut-on pas le faire maintenant ? Tout simplement parce que la loi est devenue d’un compliqué… Insupportable. Plus de dix mille cinq cent lois et cent vingt sept MILLE DÉCRETS. Et qui apprend tout ça par coeur ? Certainement pas tout le monde. Pour retenir tout ce bordel législatif, il faut avoir de la patience et de l’assurance. Pourquoi n’était-il pas allé avec ses enfants à cette croisière ? Travail. Boulot, travail. Sam observa la pile de paperasse sur son bureau et soupira longuement. Ce serait amusant de voir les accusés se défendre seuls face à d’autres qui connaissent la loi sur le bout des doigts… Cependant… Si on pouvait éviter de le faire chier avec tout ce bordel… Il avait gagné tous ses procès jusqu’alors. Trimer pour donner raison à un camp plutôt qu’à un autre… Pourquoi ne peut-on pas avoir tout de graver directement dans le cerveau ? Assis sur son canapé, une clope au bec, Sam grogna en lisant certains articles… Il avait une mémoire incroyable et pourtant, il lui arrivait de paumer ses clés… BON TU VAS L’APPRENDRE CE PUTAIN D’ARTICLE DE MERDE ? Cela faisait six heures entre la veille et aujourd’hui qu’il bossait sur ce foutu plaidoyer, il sentait presque ses muscles être tétanisés tant il était agacé de la situation. Pas aujourd’hui, par aujourd’hui. Il se releva rapidement, posa tous ses papiers sur la table basse et monta dans sa chambre. Cela faisait longtemps qu’il n’avait pas fait un peu de sport, c’est peut-être pour ça qu’il se sentait aussi… agacé. Sam grimpait les marches quatre à quatre, il saisit un jogging, un tee shirt, il les enfila et redescendit. Les clés…. De la musique… Parfait. Tout est parfait. Ce dégourdir les jambes, ça ne fait pas de mal, n’est-ce pas ?

Il sortit après avoir vidé la cafetière de son contenu, puis il sortit, ferma la porte et alla courir. La ville lui offrait ses plus beaux attraits, il épousait de ses yeux les magnifiques bâtisses, le sol pavé, parfois goudronné. Il aimait cet endroit, peut-être que cela lui permettait finalement de ne plus penser à la peur… De ne plus revoir des flammes dévorer un corps parfait… Peut-être que finalement… C’était mieux d’être ici… ? Il se souvint alors des paroles de June en passant à côté d’un court d’eau entre des pavés… La pluie de la veille avait été torrentielle, puis s’était arrêté et cela, pendant de longues minutes, en alternance. Il observa l’eau s’écouler et secoua négativement la tête. Il avait couru combien de temps ? Il ne savait pas. Il s’arrêta et s’assit, observant les alentours, assis sur un banc. Son torse se soulevait au rythme de sa respiration… Il était assez sportif, du coup il n’était pas vraiment très essoufflé. Sam se redressa lentement au bout de plusieurs minutes, il passa la musique et rentra au pas de course. Bien plus rapidement. Il s’amusait à imaginer, comme autrefois, des flics à ses trousses. Bon, il n’était toujours pas apprécié par les flics, mais au moins, il vivait moins dangereusement, le regrettait-il ? Il n’en savait rien et, à vrai dire, il s’en foutait complètement. Accélérant encore l’allure d’un cran, il rentra dans sa cour en grimpant le mur pourtant… Lisse. Il n’avait rien perdu ou presque. Il retomba de l’autre côté et observa ses mains… Hmph. Une erreur de débutant. Il avait un peu mal, c’est vrai. Sa main était un peu ouverte, mais bon…

Il rentra dans la maison des Smilovski et se soigna rapidement la main. Pas quelque chose de notable ni de très grave en réalité. Il observa sa main, ça ne saignait déjà plus. Il grimpa à nouveau les marches après avoir but un peu d’eau pour étancher sa soif. Retirant son tee shirt, son jogging, il entra dans la salle de bain. Heh, il avait la maison pour lui tout seul, autant en profiter ! Ouvrit l’eau et ferma les yeux… Il était calme à présent. Tout allait bien. L’eau ruisselait sur son torse, son corps, il se lava paisiblement… Il sortit de la douche et entendit quelqu’un sonner… Merde. Pantalon… Merde. Un coup de peigne rapidement, de toute façon c’pas comme s’ils étaient coiffés de base. Merde. Si ça se trouve Tristan ou June a oublié ses clés… Merde. Chemise noire… Merde. ET PUIS PAS LE TEMPS DE LA FERMER VOILA. Il se précipita dans l’escalier, descendit rapidement les marches et prit un instant pour souffler. Il ouvrit la porte.

Tout habillé de noir. Sam se crispa. Qu’est-ce que…  Il faillit rebrousser chemin, claquer la porte au nez et revenir avec un semi automatique. Qu’est-ce qu’ils… Il faillit se jeter sur cet inconnu vêtu de noir. Il faillit le plaquer au mur. Qu’est-ce que le FBI fait là… ?! Il avait failli trahir son esprit neutre… Heureusement, qu’il reconnut les rousseurs d’un passé lointain… Cela faisait dix-huit très exactement. Sam savait que June avait un nouveau travail, elle le lui avait avoué. En revanche. WTF. SON PATRON C’EST UN MAFIEUX ? Peut-être avait-il arrêté son ancienne profession ? En tout cas, il n’avait pas l’air de se souvenir de Sam, qui, lui, à l’inverse, se souvient parfaitement de leur première rencontre. Tiraillé entre deux pôles, Sam hésitait entre appeler June sur le champ ou bien faire comme si de rien n’était…

« ... »

Un sourire mutin se dessina sur son visage, un sourire joueur. Il savait comment profiter de la situation, mais pourquoi le ferait-il ? Il répondit de sa voix calme, qui ne voilait que très peu son amusement présent. Il se souvenait parfaitement de ce rouquin... Il se souvenait surtout de certains mordillements de lèvre, certains regards qui laissaient présager de ce qui allait se passer la prochaine fois qu'ils se reverraient...

« Oh, thanks, it’s nice of you ! »

Il prit les affaires de June et, il se retourna. Il ne pouvait pas s’en empêcher. Il devait dire quelque chose. Il ne pouvait pas laisser s’échapper un si bel âtre… Il tourna son visage vers la droite, jetant un regard par dessus son épaule.

« I hope you remember me, we met before… In other circumstances. »

Sam émit un rire étrangement nerveux. Voilà que le  désir s’emparait à nouveau de lui. Depuis qu’il était ici, il ne s’était même pas amusé un peu… C’était triste non ? Après tout, qui n’aime pas s’amuser ? Hormis les coincés du cul, bien entendu. Il l’invita à rentrer d’un geste de tête et posa les affaires de June sur un coin de l’escalier, il les monterait plus tard. Il se tourna ensuite vers son invité.

« I also hope that June works in a restaurant and not in a small group of mafia. »

Sam alla refermer la porte avec un sourire plus du tout dissimulé. Il alla vers l’une des armoires remplies de bouteilles d’alcool. Il tourna seulement ses iris sombres vers l’invité et demanda :

« Would you like something to drink ? »

 

Pris au piège. Sentait-il que son invité était tendu ? Entre tension et incertitude. Il ne se souvenait vraiment pas et cela l’amusait au plus haut point. Dans cette maison, c’est lui qui menait la danse. Est-ce que l’ancien mafieux avait une arme ? Sam préféra ne pas se poser trop de questions de ce genre, ce serait fâcheux. Il ferma les yeux en silence et chercha dans l’étagère où l’alcool reposait, il se souvint. Ce jour-là. Il avait pris un Whisky. Sa mémoire était aussi précise que cela, oui, alors qu’il lui arrivait d’oublier son propre anniversaire. Parfois il ne savait même plus où étaient ses lunettes alors qu’il les avait sur le nez. L’habitude, son empire était total sur lui. Intelligent et pourtant, parfois, tête en l’air. Il était tout de même toujours d’une réflexion immense… Qu’importe, le seul reflet qu’il avait en ce moment même était celui de ce mafieux, dans le verre qui le séparait de la bouteille de whisky. Il la prit d’un geste lent. Sam n’avait aucune notion réelle de français, en revanche, il avait compris les deux mots. Certainement avait-il déjà passé aux mains d’une ou d’un français ? Il essaya de se souvenir, mais concentra plutôt son attention sur la bouteille enfin saisie. Il servit un verre à son invité, ainsi qu’à lui-même. Il rafraîchit également la boisson en y mettant des glaçons. Oh, scandale allez vous pester. Pas de peur, ce sont des glaçons en pierre. Ainsi, l’alcool est frais et son goût n’est pas dénaturé par de l’eau…

Alors qu’il lui servait un verre, il l’entendit se justifier. Plus dans la mafia hm ? Il espérait bien que ce ne soit pas des mensonges. Il avait appris à être sur ses gardes, et pourtant, il n’y parvenait pas vraiment avec un si joli minois derrière-lui. C’était ça, son plus grand péché. Cueillir monts et merveilles pour un joli visage. Tant que ce mont et que cette merveille n’est pas trop douloureux à atteindre. Ces derniers mots énoncés avec une telle once de taquinerie eurent pour effet d’agacer le père de famille. Était-il réellement en train de le jauger ? Voulait-il voir qu’il avait été piqué un peu par ses paroles ? Il n’y avait qu’une seule chose qui l’avait montré, c’était ses mâchoires qui s’étaient serrées. Dommage qu’il soit dos à lui.

« … I remember that you like whiskey. »

Il se tourna lentement vers son invit-… Depuis quand s’était-il rapproché ? Sam aurait juré qu’ils faisaient la même taille, alors pourquoi avait-il l’impression, d’un coup, d’être plus petit que lui ? Ce visage enjôleur, cette expression, Sam étira un sourire léger pour l’accueillir, un sourire presque rêveur. Un sourire, un instant, un moment seulement… L’instant d’après, une lueur de défi traversa ses yeux. Oh, il voulait vraiment l’acculer dans sa maison ? Et cette voix… Sentait-il à quel point le désir lui brûlait l’estomac et la gorge ? Trop de temps avait passé, trop de jours. Voilà qu’il affichait un sourire de défi. Sam haussa un sourcil et son sourire s’étira encore davantage.

« Oh. Of course I’ll help you remember me. »

Sur ces mots, il s’extirpa de l’armoire et de cet homme, après lui avoir mit dans la main, un verre. Était-il Satan en personne ? Démon ou simple vil tentateur ? Sam voit son sourire qui redevint un peu plus neutre et au combien lourds de sous-entendus. Il s’avança alors dans la pièce et affiche un sourire amusé. Il désigna une chaise à ce vil démon et l’invita à s’asseoir d’un geste simple. Était-ce une obligation ? Non. Mais cela lui permettrait de se remémorer chaque moment passé dans ce bar. Et pourtant… Dix-huit ans… cela remontait à loin. Alors, il commença à tourner dans la pièce, à faire les cent pas. Machinalement, il passa une main dans ses cheveux qui était un peu moins mouillé que auparavant. Il posa son regard un instant sur son invité et se tourna entièrement vers lui. Voilà, il se souvenait. C’était comme un nuage flou et pourtant il se souvenait de plusieurs choses avec exactitude. Comment faisait-il ? Avait-il vraiment une aussi bonne mémoire ou bien… avait-il seulement un souvenir de ce visage parfaitement ancré ? Ce visage, cette expression. Il lui semblait qu’avec l’âge il était devenu encore plus irrésistible. Il lui semblait que ce visage avait cependant changé. Il ne l’avait pas vu chaleureux autrefois.

Sam s’approcha lentement de son invité. Un pas… Puis l’autre… Comme une aiguille qui avance sur un cadran. Comme un étrange rythme langoureux. Allait-il vraiment se déshabiller ? Allons, ce serait trop simple. Allait-il le déshabiller ? L’avenir nous le dirait. Il commença donc à énoncer ses paroles… « Hm… I remember one particular sentence. » Il commença à tourner autour de la chaise, une fois dans le dos du mafieux, il pencha doucement son visage vers le sien et lui susurra à l’oreille. « ‘We’re not taking part of this.’ » Il se redressa lentement et il continua le tour de cette chaise comme s’il survolait une proie avant de s’abattre sur elle. Sam revint devant lui et croisa les bras, un sourcil haussé, un sourire charmeur aux lèvres.

« That was… Maybe… Eighteen years ago… Maybe less, maybe more. »

Il haussa alors les épaules et se saisit de son verre qui était posé sur la table jusqu’alors. Il lui tendit le verre. Debout, face à son invité assis. Il avait compris son petit jeu de domination. Oui, il avait compris. Sam était loin d’être bête. Et surtout, il était loin de se laisser faire aussi facilement. Il ferma un œil, un sourire amusé aux lèvres. Ce sourire constant, cette étincelle de victoire dans le regard. Il dit alors d’un air amusé.

« But, unfortunatly, we didn’t introduce ourselves, before. I’m Sam Smilovski, nice to meet you again. »

Alors que sa phrase s’échouait comme une délivrance, il ferma les yeux et ponctua sa phrase, sur un ton de défi. Hm… Davantage de la taquinerie. Il avait un coup d’avance sur lui. Il le savait. Maintenant il en avait deux. Il murmura un dernier mot, pourtant audible et pourtant qui se voulait être entre soupir et léger rire… Rire comment ? Était-ce de la nervosité ou bien était-il a ce point secoué par cet ancien mafieux ?

« Mafioso ~ »

Il observa le rouquin… L’observait-il seulement ou bien avait-il toujours cet air amusé, cet air perpétuel d’envie de jeux ? Tout ce qu’on voyait, c’était comme une petite flamme qui dansait dans son regard. Une étincelle, une lueur, et quelle lueur.

« Do you remember me now… ? Or… Do I have to be more precise on several facts that happend that day ? »