Le jeune homme ferma la porte de sa demeure puis barra la porte, histoire de s’assurer que tout le monde était toujours en sécurité. Il rangea ses clés et, découragé, regarda tout autour de lui. Pris entre ses jambes se trouvait tout ce qu’il avait décidé de prendre avec lui pour son excursion tardive. Il y avait les classiques ; son sac à dos, son télescope, sa batte de baseball et sa caméra, mais cette fois-ci, un objet inhabituel venait l’importuné ; un thermos qui contenait un chocolat chaud préparé par sa mère. Ça allait être difficile de tout gérer. Matthew enfila son sac sur ses épaules, qu’il compléta de la ganse de son étui à caméra et celle de son télescope. Ne restait plus que la batte et le contenant.

Il se pencha puis prit les deux objets. Il serra son poing solidement autour de la batte de baseball qu’il tenait dans sa main droite et agrippa le thermos.

Matthew ne portait clairement plus ce genre de boissons chaudes dans son cœur depuis ce fameux jour. Chaque fois qu’il s’en approchait, un sentiment de culpabilité refaisait surface. Dieu seul sait à quel point c’était difficile pour quelqu’un d’aussi sentimental que lui de rester fort lorsque cela arrivait, mais il ne pouvait pas refuser l’attention de sa mère. C’était bien trop inhumain, alors il prendrait un coup pour l’équipe, histoire de ne pas la blesser.

Il réfléchit une dernière fois, avant de se mettre en marche, quant à l’intérêt de chacun des objets qu’il avait en ce moment sur lui. Étaient-ils tous utiles ? Le télescope était au centre de sa balade de fin de soirée, évidemment, le but était après tout d’observer la voûte céleste comme il le faisait si fréquemment. Son sac à dos contenait de quoi grignoter, une trousse de premier soin et une lampe de poche, ce qui était essentiel lorsqu’on se promenait seul la nuit dans une forêt. La batte servait à tabasser n’importe qui ou quoi lui voulant du mal. Classique. Ne restait plus que la caméra. Elle était là seulement au cas où un phénomène paranormal arriverait. Au cas où, voilà les mots clés. Néanmoins, si quelque chose se produisait vraiment, il aurait l’air d’un idiot le lendemain, sans rien pour prouver ses dires.

« Argh, tu sais quoi Matt ? Tu peux le faire. Il n’arrivera probablement rien de toute manière. Pas grave.»,se murmura-t-il à lui-même avant de finalement quitter le devant de sa maison.

Il marcha durant quelques minutes dans les rues de sa ville natale pour finalement prendre un raccourci par le parc. Plus Matthew s’éloignait de la main street, plus le nombre d’habitants qu’il croissait diminuait. Il faisait noir et une grande partie des occupants de la place qui ne sortaient pas pour faire la fête étaient probablement cachés sous leurs couvertures, profitant du Vendredi soir pour écouter un film avec leur famille. Un moment parfait pour partir en excursion seul, sans que personne ne vienne ne le déranger.

Il s’arrêta brusquement en plein milieu du sentier, entendant une voix aiguë murmurer des paroles qui semblaient être chantées. Matt frissonna. Était-ce sa vieille grand-mère tentant de l’accuser de sa mort pour la millième fois ? Il réfléchit quelques secondes, trouvant l’air de plus en plus familier. Il manquait définitivement quelque chose. Oui ! Perdu dans ses pensées, il avait complètement oublié de mettre ses écouteurs et voilà que cette fameuse chanson pour enfant, cooking by the book, jouait au volume max dans les deux bouts en caoutchouc qui pendait dangereusement de sa poche. Le jeune homme rigola de lui, trouvant la situation absurde.

Les deux mains occupées, il fut forcé de déposer l’arme et la boisson en plein centre du trottoir pour, finalement, replacer les écouteurs dans ses oreilles. Bravo, t’as l’air d’un vrai champion, pensa-t-il sarcastiquement. Si le parc n’avait pas été quasiment vide à cette heure, il aurait probablement eu honte en plus de bloquer l’entièreté du passage. Peut-être qu’apporter autant n’était pas une si bonne idée finalement.

Il continua sa marche, marmonnant joyeusement les paroles absurdes que la jeune Steph chantait. Il devait l’avouer, la chanson, bien que destinée à un public trop jeune pour lui, était vraiment accrocheuse. Il s’assumait complètement. Pas grave si un jour quelqu’un riait de ses gouts musicaux.

Lorsque la courte mélodie fut terminée, il décida de boire une gorgée de chocolat chaud. Le seul problème ? Il n’avait pas du tout accès au liquide. Ses deux mains étaient prises. Déposer sur le sol une seconde fois sa batte en évitant que tous les sacs ne glisse sur sa tête ne serait pas l’option la plus sécuritaire ni efficace. Matthew fut alors frappé d’une idée.

Son plan lui semblait brillant. Il n’avait qu’à placer la batte sous son bras pour avoir accès facilement au bouchon du contenant. Continuant de marcher, Matthew tenta de mettre en action son idée de génie. Il se rendit rapidement compte que l’exécution était plus difficile que ce qu’elle paraissait lorsqu’il avait forgé sa tactique. Luttant toujours contre le bout de métal, l’adolescent finit par l’ouvrir. Concentré sur sa boisson et non la direction vers laquelle il marchait, il sentit son corps foncé dans un objet de grande taille. Ou une…personne. Le liquide brulant contenu dans le thermos vola et atterrit sur l’homme en face de lui, lui rappelant un souvenir qu’il préférait oublier.

« Oh shit ! Désolé c’était pas moi, c’était ma grand-mère ! », affirma-t-il en retirant ses écouteurs, batte toujours sous le bras.

Ça sonnait plus normal dans sa tête.